On ne le répétera jamais assez : la Toussaint n’est pas la fête des défunts (célébrée le lendemain) mais celle des saint.es – donc potentiellement la vôtre ! Dérivée de la fête de commémoration des des martyrs de l’Église, la Toussaint célèbre tou.tes les saint.es : personnages historiques ou légendaires (reconnus par l’Église mais dont la réalité historique n’est pas sûre), martyrs ou non. L’occasion pour nous de vous présenter dix saintes qui prouvent que l’on peut être un modèle de foi, de vertu ET de badasserie.
La diplomate : Catherine de Sienne (1347-1380)
Quitte à n’en choisir que dix, on ne pouvait pas ne pas parler de la patronne des journalistes et des médias ! C’est à son abondante correspondance en faveur de la papauté que Catherine de Sienne doit ce titre, ainsi que son rôle de médiatrice. Après avoir joué un rôle déterminant dans le retour des papes à Rome, elle remplit plusieurs missions diplomatiques importantes pour le compte de la papauté. Et quand elle ne négocie pas la paix entre Rome et Florence, Catherine de Sienne écrit des traités théologiques qui comptent encore aujourd’hui parmi les grands textes religieux médiévaux.
La voyageuse : Ursule de Cologne (IVe siècle)
Épouser un parfait inconnu, même quand on est une princesse de Cornouailles du IVe siècle, n’a rien de réjouissant. Ursule repousse toutefois l’échéance de façon particulièrement inventive : elle demande trois ans pour réfléchir et effectuer un pèlerinage à Rome, le tout en compagnie de… 11000 vierges ! Et comme nous sommes dans un récit légendaire, ça marche : le cortège prend la mer, avant de descendre le Rhin et d’atteindre Rome sans dommages. Le retour ne se passe malheureusement pas aussi bien, et les jeunes femmes se font tuer en passant par Cologne, qui vient de tomber aux mains des Huns. La ville saura se faire pardonner en faisant d’Ursule sa sainte patronne et en construisant une église sur le lieu supposé de son martyre (en vrai, un ancien cimetière romain, d’où le grand nombre d’ossements).
La résistante : Geneviève de Paris (v. 420 – v. 500)
« Là où Attila est passé, l’herbe ne repousse plus ». Autant dire que les Parisiens n’en mènent pas large lorsque les Huns sont aux portes de la ville en 451 : les hommes sont déjà prêts à fuir. Mais Geneviève n’entend pas baisser les bras et exhorte les Parisiens mais surtout les Parisiennes à résister : « Que les hommes fuient, s’ils veulent, s’ils ne sont plus capables de se battre. Nous les femmes, nous prierons Dieu tant et tant qu’Il entendra nos supplications. ». Ragaillardis – ou piqués au vif – les Parisiens renoncent à quitter la ville, qu’Attila contourne sans l’attaquer. En 476, Geneviève viendra une deuxième fois en aide aux Parisien.nes, en assurant le ravitaillement de la ville assiégée par le roi Childéric Ier.
L’indestructible : Thècle d’Iconium (Ier siècle)
RIEN ne peut faire dévier Thècle de la voie qu’elle s’est choisie. Elle est condamnée au bûcher pour s’être convertie au christianisme? Les flammes l’épargnent et sont éteintes par la pluie. Un gouverneur qu’elle a éconduit la jette dans la fosse aux lions ? Les lions attaquent plutôt les spectateurs. On essaie avec des serpents ? Un globe de feu les carbonise. On tente de l’écarteler ? Les cordes cassent. Thècle est finalement laissée libre et rejoint Saint Paul, dont elle fût une disciple fidèle. Elle enseigne, baptise et guérit les malades, ce qui lui vaut l’inimitié des guérisseurs de la région. Ils envoient un jeune homme la violer mais la grotte de Thècle se serait alors refermée sur elle pour la protéger. Une grotte de Maloula (Syrie) est vénérée encore aujourd’hui comme le tombeau de Thècle.
L’intellectuelle : Thérèse d’Avila (1515-1582)
Mystique et fondatrice de l’ordre du Carmel, Thérèse d’Avila est une autrice prolifique. Son œuvre comprend des traités de théologie, des ouvrages didactiques ainsi que de nombreux poèmes et une correspondance fournie. Ses textes lui vaudront de jouer un grand rôle dans la vie intellectuelle et religieuse de son époque, mais connaîtront aussi une importante postérité : toujours réédités, lus et commentés, ils constituent l’un des grands jalons de l’histoire de la pensée. Last but not least, ils vaudront à Thérèse d’Avila de devenir en 1970 la première femme docteure de l’Église (quelques mois avant Catherine de Sienne).
La bonne fée : Dymphne de Geel
Un roi fou de chagrin d’avoir perdu son épouse envisage de se remarier avec sa propre fille, qui fuit se cacher au loin… Ça vous rappelle quelque chose ? La vie de cette sainte légendaire est bien l’une des sources utilisées par Charles Perrault pour Peau d’Âne. La fin de Dymphne est cependant bien plus sombre puisque son père la retrouve et la décapite : il est alors dit qu’un ange «recolle » la tête de la sainte, sous le regard d’un fou qui retrouve la raison. Dymphne va alors devenir la patronne des malades mentaux et à partir du XVe siècle une tradition d’accueil et de soins psychiatriques va se développer à Geel (Belgique) où se trouve la tombe de la sainte. La particularité de cet accueil reste encore aujourd’hui l’intégration des patients à la communauté : suivis par des psychiatres, ils sont toutefois accueillis dans des familles d’accueil.
Les rebelles : Marguerite d’Antioche, Barbe et Catherine d’Alexandrie
On oublie souvent que l’histoire sainte ne manque pas de figures féminines revendiquant le droit de vivre leur foi et leur vie comme elles le souhaitent, résistant fermement aux hommes et à l’injonction au mariage. Simple bergère, Marguerite tient tête au préfet romain Olibrius qui veut l’épouser. Elle est alors jetée en prison, où un dragon l’avale : elle éventre alors celui-ci d’un coup de croix. Barbe refuse le mariage imposé par son père : celui-ci l’enferme alors dans une tour à laquelle il met le feu mais Barbe parvient à s’en échapper. Catherine d’Alexandrie refuse les avances de l’empereur Maximien et soutient victorieusement un débat avec cinquante savants envoyés par celui-ci pour lui démontrer l’inanité de la religion chrétienne. Toutes trois seront décapitées mais leurs exploits demeurent une source d’inspiration pour tou.tes les croyant.es.
La poilue : Wilgeforte
Plusieurs versions expliquent la poussée miraculeuse d’une barbe chez cette jeune sainte : empêcher son viol par des soldats, repousser un prétendant un peu trop entreprenant ou les tentatives d’inceste de son père. Toutes visant à se débarrasser d’un homme, Wilgeforte a vite été surnommée Sainte Débarras : le philosophe et théologie anglais Thomas Moore raconte que les femmes se rendaient à la cathédrale Saint-Paul-de-Londres prier Wilgeforte en lui offrant de l’avoine, afin qu’elle leur procure « le cheval qui servira de monture au mauvais mari pour l’envoyer au diable » !